Ce fut une surprise pour tout le monde : le Pape François a lancé une année consacrée à Saint Joseph, par une lettre apostolique « Patris corde » (Avec un cœur de Père). La date n’a pour tout pas été choisie au hasard : c’est le 8 décembre 2020, pour le 150ème anniversaire de la proclamation de Joseph, comme Patron de l’Eglise universelle, faite par le Bienheureux Pape Pie IX, qui avait déclaré en 1854, que Saint Joseph était « la plus sûre espérance de l’Eglise après la Sainte Vierge ».
Le Pape médite sept aspects de la paternité de Joseph, une paternité bien particulière, à la fois non charnelle et s’adressant néanmoins au Fils éternel de Dieu ; décrivant cette relation unique dans l’Histoire du Salut, Bossuet écrivait que Dieu « a fait en quelque sorte, couler en son sein quelque rayon ou quelque étincelle de cet amour infini qu’Il a pour son Fils ; c’est ce qui lui change le cœur, c’est ce qui lui donne un amour de père. » (Panégyrique de Saint Joseph, 1659).
On sait le lien puissant qui unit le Pape François à celui qu’il qualifie de « figure extraordinaire » : son blason comporte la fleur de nard, représentation hispanique de Saint Joseph ; intronisé le 19 mars 2013, il fit introduire la mention obligatoire de Joseph dans toutes les prières eucharistiques quelques semaines plus tard (1er mai 2013, mémoire de Joseph, patron des travailleurs).
Ce texte très personnel est le fruit de sa dévotion à Joseph ! (Solennité de Saint Joseph).
Le Pape ne cache pas son objectif : « faire grandir l’amour en ce grand saint, pour être poussés à implorer son intercession et pour imiter ses vertus et son élan ».
La figure de Joseph, dans sa réalité bien cachée et pourtant si efficace, est affirmée comme modélisante pour ce temps de pandémie. Les différentes vertus de sa paternité sont présentées comme autant de « remèdes » à adopter pour traverser cette épreuve mondiale. Le Pape relit et relie la vie de Joseph à ce que nous vivons tous actuellement.
Joseph a été confronté à des choix importants, et même vitaux : que faire de sa relation avec Marie enceinte ? Que faire à Bethléem alors que rien ne les y attend ? Que faire alors que la vie de l’enfant-Dieu est en jeu ? Que faire alors qu’il faut rentrer d’Egypte ? Que faire alors que l’Enfant, devenu adulte selon la loi juive, a disparu ? Les urgences, les périls, l’exil, la précarité, Joseph a affronté ces réalités qui nous sont aussi contemporaines. Il a déployé ses vertus pour ne pas subir ces évènements, mais les traversant en leur donnant un sens.
Confiant qu’il récite chaque jour, après les laudes, depuis plus de quarante ans une prière à Saint Joseph, tirée d’un livre français de dévotions des années 1800, le Pape détaille la force de l’actualité de Joseph.
Saisi par la tendresse de Dieu, Joseph a su accueillir sa propre faiblesse pour laisser agir Dieu par de là et grâce à ses fragilités. L’homme auquel le Fils de Dieu obéit dans son humanité, a d’abord obéi aux signes de Dieu, même quand ces derniers n’étaient pas évidents. Sa foi n’a cessé de grandir au milieu des épreuves.
Dieu a forgé la délicatesse de Joseph, comme la fine pointe de sa charité conjugale et paternelle. Dieu l’a éclairé sur un chemin, davantage jalonné par un vrai sens de l’accueil que par des explications héritées de la Loi ou de raisonnements humains. Le charpentier de Nazareth déploie quotidiennement une force et un courage qui lui permettent de dépasser les tentations de colère, de déception et de résignation. Il y a chez ce juste, un élan et un désir qui lui font épouser la Providence.
Ce courage, que le Pape qualifie de « créatif » est une expression virile de sa liberté au-delà des évènements, aussi dangereux qu’ils peuvent l’être. Dieu a finalement plus confiance en l’homme que l’homme, lui-même. Le Père a fait éminemment confiance à celui que Jésus a appelé « Abba » en Egypte comme en Galilée.
Cet homme a su se lever, pour protéger la Mère et le Fils, qu’il aime. Il se lève aussi aujourd’hui pour protéger l’Eglise, qu’il aime.
De la paternité découle la protection, comme de la fleur, son fruit. Saint Jean XXIII confirme cette réalité en qualifiant Joseph de « protecteur de l’Eglise universelle » le 19 mars 1961 avant d’ouvrir le Concile Vatican II.
La paternité de Joseph se déploie aussi dans son travail qui assure à la fois, la subsistance et la dignité d’une famille.
Le sens des responsabilités a conduit Joseph à accompagner Jésus jusque dans ses « départs », dans une logique non de possession, mais de liberté.
La chasteté de Joseph dépasse éminemment sa simple pureté conjugale. Joseph nous apprend aussi que le vrai bonheur vient du don de soi, don qui dépasse le seul sacrifice qui peut engendrer la frustration.
Notre monde pandémié a besoin de pères et non de chefs, d’autorité et non d’autoritarisme, d’un don de soi qui soit beau et joyeux.
Voici donc l’actualité de Saint Joseph dans l’Eglise et dans le monde selon la piété filiale du Pape François qui nous fait demander une dernière chose à Saint Joseph : notre conversion.
Alors … au travail !
Don Stéphane Pélissier