Solennité de l’Immaculée Conception

L'Immaculée Conception

L’Immaculée Conception par Pierre Paul Rubens au musée du Prado.

Chers frères et sœurs !

Le mystère de l’Immaculée Conception de Marie, qu’aujourd’hui nous célébrons solennellement, nous rappelle deux vérités fondamentales de notre foi : le péché originel tout d’abord, et ensuite la victoire sur lui de la grâce du Christ, victoire qui resplendit de manière sublime en Marie, la Très sainte, la « Tota pulchra », la toute Pure.

– Le péché originel : L’existence de ce que l’Église appelle « péché originel » est malheureusement d’une évidence écrasante, si seulement nous regardons autour de nous et avant tout en nous-même. L’expérience du mal est en effet si substantielle, qu’elle s’impose d’elle-même et qu’elle suscite en nous la question : d’où provient-il ? L’interrogation est encore plus profonde particulièrement pour un croyant : si Dieu, qui est Bonté absolue, a tout créé, d’où vient le mal ? Les premières pages de la Bible (Gn 1-3) répondent justement à cette question fondamentale, qui interpelle chaque génération humaine, avec le récit de la création et de la chute de nos premiers parents : Dieu a tout créé pour l’existence, il a créé en particulier l’être humain à son image ; il n’a pas créé la mort, mais elle est entrée dans le monde à cause de la jalousie du démon, le diable, le diviseur (Sap 1.13-14 ; 2.23-24), qui s’est rebellé contre Dieu, et a attiré  les hommes dans son piège, en les conduisant à la rébellion. C’est le drame de la liberté, que Dieu accepte jusqu’au bout par Amour, en promettant qu’il y aura un enfant d’une femme qui écrasera la tête du vieux serpent.
– la victoire du Christ : Dès le début, et tout au long de l’histoire sainte, Yahvé Dieu entrevit la Femme prédestinée à devenir mère du Rédempteur, mère de celui qui s’est humilié jusqu’à l’extrême pour nous reconduire à notre dignité originelle. Cette Femme, aux yeux de Dieu, a toujours un visage, celui de l’humble jeune fille de Nazareth, Marie et un nom étonnant : « pleine de grâce » (Lc 1.28), comme l’appela l’Ange en la visitant à Nazareth. Aujourd’hui, et depuis le début de la chrétienté, de nombreux pèlerins se rendent dans l’humble maison de Marie à Nazareth et j’aime m’y rendre en pensée, avec vous, pour entendre, avec elle, le message de l’ange la saluant avec l’infinie délicatesse divine : « Je te salue, Marie, pleine de grâce ». Pleine de grâce ? Marie n’est pas la plénitude de la grâce, mais l’humble réceptacle de cette plénitude de grâce qu’est le Christ lui-même. Elle est la nouvelle Ève, épouse du nouvel Adam, destinée à être mère de tous les rachetés. C’est ainsi qu’écrivait Saint André de Crète : « La Theotókos Marie, refuge commun de tous les chrétiens, a été la première à être libérée de la chute de nos ancêtres » (Homélie IV sur la Nativité). C’est bien ce qu’affirme l’oraison d’aujourd’hui : Dieu « a préparé une demeure digne pour son Fils et, en prévision de sa mort, l’a préservé de toute tache du péché ». Le 8 décembre 1854, il y a 160ans, le Bienheureux Pape Pie IX, après avoir consulté les pères de l’Eglise, en a proclamé le dogme de foi, alors que la piété populaire et le « sensus fidei » la célébraient depuis l’aube de l’Eglise.

Chers frères et sœurs, en Marie Immaculée, nous contemplons le reflet de la Beauté qui sauve le monde : la beauté de Dieu qui resplendit sur le visage du Christ, ce visage que Marie a tissé en son sein virginal ; cette même beauté de Dieu resplendit sur votre visage chaque fois que vous priez Marie, que vous implorez Marie. En Marie cette beauté est totalement pure, totalement humble et libérée de tout orgueil, libérée de toute présomption. C’est ainsi que la Vierge s’est montrée à sainte Bernadette, il y a 156 ans à Lourdes, et c’est ainsi qu’elle est vénérée dans de nombreux sanctuaires et particulièrement au-dessus de nous, en la cathédrale de cette bonne et sainte ville du Puy.

Cet après-midi, selon une tradition vénérable, le pape François lui rendait hommage lui aussi auprès du monument qui lui est dédié Place d’Espagne, à Rome. Voilà celle que Joseph ne craignit point de prendre chez lui comme épouse, à la demande de Dieu lui-même dans son message porté par le saint archange Gabriel.

Pour nous, membres fidèles de l’Eglise, devant cette Mère très sainte, le seul piège que nous devions craindre, c’est notre péché. Si Marie est Immaculée, libre de toute tache de péché, l’Eglise est sainte mais en même temps marquée par nos péchés. C’est pourquoi le Peuple de Dieu en pèlerinage dans le temps s’adresse à sa Mère céleste et lui demande son aide; il la demande pour que Celle-ci accompagne son chemin de foi, pour qu’Elle encourage l’engagement de la vie chrétienne et pour qu’Elle apporte son soutien à l’espérance.

Tout au long de cette messe, dans la célébration des saints mystères de son Fils, nous invoquons à plusieurs reprises la Vierge Marie, la Vierge Immaculée : dans le confiteor au début de la messe nous implorons son intercession, au cours du Credo, nous affirmons sa maternité divine, au cœur de la prière eucharistique nous confions l’Eglise à sa vigilance et à sa bienveillance maternelle, et après la messe avant l’envoi en mission des fidèles nous aimons la chanter et à chanter avec elle, dans son Magnificat, les « Magnalia Dei », autrement dit, les merveilles de Dieu. Nous en avons tant besoin, surtout en ce moment si difficile pour la France et pour l’Europe : en oubliant leur passé, en occultant leurs racines chrétiennes, la France et l’Europe ne peuvent plus discerner ni entrevoir quel avenir construire : confions les à l’Immaculée Conception, puisqu’ en Elle se lève est l’aurore du salut.

Si à Espaly Saint-Marcel, nous admirons l’humilité de Joseph qui ne craignit pas de prendre chez lui Marie, son épouse, la toute immaculée, ce soir à son école, ne craignions pas de prendre chez nous Marie notre Mère et de la prier chaque jour.

Que la Vierge Marie, en son Immaculée Conception, nous aide à voir qu’il y a une lumière au-delà du brouillard qui semble envelopper la réalité. C’est pourquoi ne cessons de demander son aide avec une confiance filiale et fidèle :

« O Marie, conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous ».

Amen !

Publié dans Homélies.